Par Bertrand Monnet, Professeur titulaire de la Chaire Management des risques criminels de l’EDHEC et Philippe Véry, professeur associé à la chaire

Mardi 22 mai 2012
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Carte des risques terroristes par types

A partir d’une veille menée sur 100 à 120 000 sources et d’études de terrain, la Chaire Management des risques criminels a élaboré une matrice mettant en lumière les principales attaques opérées par les mafias et guérillas contre les entreprises, afin de comprendre leurs techniques, leurs motivations et leurs objectifs, dans un but préventif. Comme le décrivent Philippe Véry et Bertrand Monnet dans leur ouvrage Les Nouveaux pirates de l’entreprise (édition du CNRS, 2010), la performance économique des entreprises repose sur la combinaison adéquate de ressources humaines, financières et techniques, sélectionnées et organisées de façon à soutenir le développement d’une stratégie choisie par les dirigeants, avec l’assentiment des actionnaires et propriétaires. Les différentes organisations déploient une variété d’attaques, comme on peut le voir dans le graphique tiré de leur ouvrage :

Caractéristiques des attaques criminelles

Les attaques menées par les organisations criminelles (mafias ou guérillas) sont le plus souvent détectées par les échelons les plus opérationnels, en particulier ceux qui sont en relation avec les organisations externes. C’est par exemple un acheteur au contact des réseaux qui pourra le mieux identifier que le prix d’achat fixé est supérieur à celui d’un marché « normal ».
Si certaines mafias se laissent relativement approcher, comme la Cammora en Italie ou le clan Inagawakai en Japon, l’essentiel de l’activité de ces entreprises se soustrait naturellement aux chiffres et aux regards. En raison de cette présence réelle, mais diffuse, des organisations mafieuses et des réseaux criminels à tous les échelons de la vie économique, politique et sociale, les entreprises ont besoin de comprendre les points d’entrée sur des marchés et les noeuds de relations qui peuvent être incarnés par des acteurs issus d’organisations criminelles. Certains écosystèmes d’affaires sont particulièrement touchés, qu’il s‘agisse de secteurs d’activité ou de zones géographiques. Ainsi, en Campanie, dans le sud de l’Italie, 37% des entreprises de traitement des déchets ont un capital mafieux (source : police anti-mafia) tout comme 95% des entreprises de transport (source : patron des carabiniers de Naples). La Camorra et les trois autres mafias italiennes sont très implantées en Italie, leur CA représentant 7% du PIB du pays, soient 142 milliards d’euros, devenant ainsi un pilier de la survie de l’économie. Ces chiffres soulèvent donc les problèmes économiques et sociaux d’un hypothétique démantèlement malgré les discours officiels de lutte anti-mafia.