Par Valérie Plagnol, Economiste, Présidente de la Société d'Economie Politique

Mercredi 15 octobre 2014
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Valérie Plagnol est économiste et actuellement présidente de la société d’économie politique française. Chercheuse, professeure, et directrice de différents établissements bancaires, elle a réalisé une partie importante de sa carrière au Japon. Valérie Plagnol a en effet obtenu une bourse du gouvernement japonais et a rejoint l’université de Keio à Tokyo pour un séjour d’études pour y resterfinalement5 ans. Elle y a connu la fin de l’empereur Hirohito, qui a régné 63 ans,et l’avènement de son filsen 1989.

À partir de 1990 le Japon entre dans une période de crise, qui commence par une chute des cours en Bourse et se prolonge par une longue phase de stagnation de l’activité.

Encore aujourd’hui, cette image de crise garde une part de vérité, notamment du fait que le poids relatif du Japon dans l’économie mondiale recule. En 1994, le Japon représente 18 % du PIB mondial alors que sa part est aujourd’hui de 6,5%. Il y a 20 ans, il représentait la moitié du PIB américain alors qu’actuellement il en représente 29%. En 2012, le Japon est relégué à la 3èmeplace des puissances économiques mondiales après la Chine. On observe, dans cette période, une certaine hausse des inégalités internes: l’indice de Gini passe de 27.5 à 46.1 entre 1990 et 2013. Ce phénomène s’inscrit dans un processus général impliquant tous les pays développés mais reste spectaculaire pour le Japon.

Le Japon a donc démenti les prévisions du début des années 80 et a déçu. Hissé alors au 2ème rang mondial, érigé en modèle économique et financier, il n’est plus aujourd’hui qu’un épouvantail agité à la face d’un occident vieillissant, sous la menace planante de déflation dont tout le monde parle.

Qu’en est-il en réalité? Cette image est-elle biaisée?

Depuis ces 25 dernières années, le Japon a connu plusieurs crises, alternant avec des périodes de reprise. Ainsi, entre 2002 et 2007,on assiste à une belle reprise de l’activité. Quoi qu’il en soit, toutes ces crises ne sont pas de même nature et toutes ne sont pas dues à des causes internes. Il y eut des chocs endogènes et des chocs extérieurs.

Les deux grandes crises proprement japonaises sont la bulle financière de 1990 et la catastrophe de Fukushima en 2011. Entre les deux, le pays a subi une série de chocs internes et externes qui n’étaient pas tous réellement la conséquence d’une situation générée par le Japon.

La société japonaise s’est beaucoup transformée et cela s’est traduit par des tensions et une re-segmentation de la société.

Fin 2012, le Premier ministre, Shinzo Abe,a été réélu et a redonné de l’espoir aux japonais en lançant le pari de la restructuration de l’économie japonaise. Après deux ans d’Abenomics on peut tenter d’en dresser un premier bilan.

Valérie Plagnol se propose de revenir dans un premier temps sur la chronologie de l’économie japonaise depuis les années 1990, en se posant notamment la question de savoir quelles sont les conjonctions des chocs et des périodes de reprise.

Ensuite, elle analysera les caractéristiques de ce modèle économique. En quoi a-t-il été transformé ? En quoi a-t-il du mal à se transformer ?

En conclusion, la conférencière propose de dégager certaines leçons pour l’Europe.

Les questions liées aux affaires extérieures seront volontairement laissées de côté. Le Japon reste dans une position diplomatique difficile, ambiguë et délicate. On observe une forme d’ambivalence par rapport à la bombe atomique, le Japon endossant à la fois le rôle d’agresseur et de victime. Par ailleurs d’autres questions se posent à propos de la Constitution et de son article 9par lequel le Japon renonce à la guerre même en cas dedéfense. Des difficultés sont aussi liées au rôle qui lui a été dévolu en tant que tête de pont de l’Amérique en Asie, ce qui met le pays dans une situation difficile encas de tension sino-américaine. Au Japon, cette problématique a été nommée le «Nixon choc». Enfin, des difficultés proviennent aussi des règlements territoriaux datant de la guerre. Les relations diplomatiques du Japon avec ses voisins sont donc toujours très compliquées. Mais les inconvénients de ces tensions sont à relativiser, eu égard à sa forte intégration économique en Asie.


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