Par François-Xavier de Vaujany, Professeur à l’Université Paris-Dauphine, et Hélène Lambrix, doctorante de la Chaire IESOPar Bertrand Monnet, Professeur titulaire de la Chaire Management des risques criminels de l’EDHEC et Philippe Véry, professeur associé à la chaire

Mardi 25 septembre 2012
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Cadrage

Aujourd’hui, les attentes de la société civile vis-à-vis de l’entreprise sont de plus en plus fortes et la question de la réputation devient un enjeu crucial pour les organisations. Actif stratégique d’accès aux ressources, permettant de se démarquer des concurrents mais également actif manipulé et manipulable, la réputation et le « souci réputationnel » peuvent très vite se transformer en poison pour l’entreprise, tant sur le plan de l’éthique que de la performance.
D’après Fombrun, la réputation est « un jugement collectif développé par les parties prenantes d’une organisation qui a démontré dans le temps sa capacité à délivrer de la valeur par rapport à ses concurrents ». On prête à la bonne réputation grand nombre de vertus, permettant notamment de dresser une barrière défensive contre les concurrents ou encore une source de fidélisation des employés. La gestion de la réputation est donc fondamentale pour l’entreprise.

Des cas pour illustrer le caractère multiple de la réputation

Le cas des sciences de gestion au sein des universités illustre une tendance nouvelle : la convergence croissante entre réputation et e-réputation. En effet, alors que les premières publications scientifiques (Journal des Savants, 1665) s’adressaient à un public d’avertis, restreint et confidentiel, l’écriture s’est muée aujourd’hui en écriture marchande, où la réputation des chercheurs se confond avec leur e-reputation, basée sur les classements de prestiges des revues et le nombre de fois où les articles sont cités dans d’autres articles eux-mêmes publiés dans des revues prestigieuses. Les outils pour communiquer sur ce marché des citations sont de mieux en mieux maîtrisés par les chercheurs qui les utilisent à des fins de réputation.
L’illustration d’un cas de crise organisationnelle, connu par l’Université Paris Dauphine en 2011 dans le cadre d’un bizutage qui dérape, met en lumière le rôle prépondérant des parties prenantes mais aussi des réseaux dans l’évolution d’une réputation. Ce cas permet de mettre en évidence deux éléments prépondérants dans la dynamique de la crise. D’abord, le capital réputationnel initial aura une incidence capitale sur la réparation de la réputation : le capital réputationnel amortit les dégâts causés par les interprétations négatives en cas de crise. Aussi, ce cas montre l’aspect systémique de la crise : la crise réputationnnelle d’un acteur du secteur peut s’étendre à autres organisations ; les médias jouent un rôle prépondérant dans ce processus de crise réputationnelle.
Enfin, le cas SAP, entreprise jouissant d’une excellente réputation, remet en question la croyance selon laquelle être réputé ne présente que des atouts. En effet, il ne faut pas occulter les risques inhérents à la réputation. On peut penser qu’un effet de levier existerait si une entreprise réputée devenait la cible de ses concurrents ou des régulateurs en cas de déviance. Un évènement touchant une entreprise aura d’autant plus de retentissement que celle-ci sera réputée.

Questions et prolongements

Le débat suivant la présentation a permis de soulever la question de savoir si la réputation peut être appréhendée comme globale pour l’entreprise, ou si elle dépend non seulement des aires géographiques mais aussi des parties prenantes concernées. Les relations entre réputation, image et identité de l’entreprise sont également questionnées. Plus largement, la manière dont se forge la réputation est au centre de la réflexion, en distinguant réputation négative et réputation positive.